Voilà plus d'un mois que les Colonnes infernales du général Turreau avaient entamé leur campagne de destruction de la Vendée, lorsque Mortagne fut visé à son tour.La marche sanglante des soldats de Turreau a fini par rallumer de nouveaux foyers de révolte contre leurs crimes. Sentant que des bandes d'insurgés menaçaient Cholet, le général en chef ordonna à Huché d'y conduire sa division cantonnée jusqu'alors à Luçon. Trop tard cependant pour contrer l'attaque de Stofflet qui coûta la vie au général Moulin (ci-contre, combat du 8 février 1794).
Après avoir pris le commandement de la place de Cholet, Huché fut informé que des rassemblements se formaient autour de La Gaubretière (Savary, t. III, p. 231). Il entreprit aussitôt une manœuvre de ce côté-ci de la Sèvre et fit son entrée à Mortagne le 26 février. L'épisode nous est rapporté par Boutillier de Saint-André :
« Un soir que nous étions réunis dans la seule chambre épargnée par l'incendie [du 15 octobre 1793], un général vint loger à la maison [l'actuelle cure]. C'était Huché ! L'affreux Huché !… Il entra brusquement, sans se faire annoncer, accompagné d'une nombreuse suite. Mon aïeule se présenta pour le recevoir ; elle frémit à son aspect hideux et féroce… Le général, qui était ivre et qui, en venant de Cholet, était tombé deux fois de son cheval, avait plusieurs contusions à la figure et semblait plein de sang plutôt que de vin, nous dit : Vous êtes bien tranquilles ici ; vous ne savez donc pas que je puis vous faire tous brûler dans vos masures ? Pour détourner l'attention de l'officier, l'hôtesse se proposa de le soigner : Il faudrait vous faire tirer du sang, lui dit-elle. A quoi Huché rétorqua : Apprenez que c'est moi qui en tire aux autres. Je suis boucher… boucher de chair humaine. »La réputation sanguinaire de ce général était telle, qu'aucun patriote de Mortagne ne vint lui rendre visite, pas même les officiers de la garnison. A peine installé, Huché ordonna l'exécution de deux paysans, un père et son fils, qu'on lui avait amenés. «Ladrez-les, dit-il d'un air féroce ; sabrez-les, taillez-les à coups de baïonnettes.» Les deux victimes furent suppliciées devant la maison, sur les marches de la grande porte de l'église. Lorsque les bourreaux demandèrent au général la permission de les achever, celui-ci leur répondit : «Gardez-vous-en bien, enfoncez-leur vos sabres jusqu'à la garde dans le corps ; taillez et retaillez ! Et il faisait, avec ses bras, les gestes et les mouvements significatifs, d'une manière qui annonçait qu'il était familier avec de pareilles horreurs.»
Sources :
Une famille vendéenne pendant la Grande Guerre de Vendée (1793-1795), mémoires d'un père à ses enfants, éditions du Bocage, 1995, pp. 247-249.
L'Histoire du pays de Mortagne, par Maryvonne Mênard, 1988, t. II, p. 166.
Illustrations : La mort du général Moulin au combat de Cholet, 8 février 1794 (Jules Benoît-Levy, Musée d'Art et d'Histoire de Cholet) ; vue aérienne de Mortagne-sur-Sèvre (au premier plan à gauche, la maison où Huché passa la nuit du 26 au 27 février 1794) et de l'église devant laquelle les deux paysans furent massacrés.
26 février 1794, Huché sème la terreur à Mortagne
Commentaires sur 26 février 1794, Huché sème la terreur à Mortagne
- Bon travail de collation