Le Souvenir Chouan de Bretagne vient de rendre compte de la journée d’été du Souvenir de la Chouannerie Mayennaise, en mémoire de Joseph Juste Coquereau. Je renvoie à cet article détaillé qui présente notamment les collections de l’association exposées au Musée de Château-Gontier.

Eglise de DaonJ’en profite également pour rendre hommage à ce personnage comme on les aime, tout en efficacité… Joseph Juste Coquereau est né à Daon le 15 mai 1768. Le bourg de Daon appartenait en ce temps-là à la province d’Anjou à laquelle il fut arraché lors de la création du département de la Mayenne en 1790. C’est également la paroisse natale de l’abbé Bernier (1762-1806), célèbre figure des Guerres de Vendée.

Issu d’une famille de marchands-tisserands, Joseph Coquereau fit ses études au Collège de Château-Gontier, mais rêvait de s’engager comme soldat. Il essaiera à plusieurs reprises, tandis que son père fera tout pour s’y opposer. En 1791, le jeune homme se marie à Marigné avec Magdeleine Marie Julienne Renard. Ses tracas avec les patriotes commencent à cette époque, puisqu’il refuse de faire bénir son union par un prêtre assermenté. Il n’en fallait guère plus pour réveiller son goût des armes. L’insurrection de mars 1793 le fait basculer dans la guerre. Il rallie les Vendéens en juillet, puis retrouve son pays lors de la Virée de Galerne, pour y lever de nouvelles recrues. Il y restera pour animer la résistance contre les troupes républicaines dans cette partie du Haut-Anjou.


Il mène ses premiers coups de main avec une poignée de fidèles au début de l’année 1794, déboisant allègrement les arbres de la ci-devant liberté dans tout le district de Châteauneuf-sur-Sarthe, jouant à cache-cache avec les Bleus – dix fois plus nombreux – lancés à sa poursuite. En liaison avec d’autres troupes chouannes de la région, il intègre en juin l’armée de Scépeaux dont le champ d’action s’étend entre Anjou, Maine et Bretagne.

ChouanUlcéré par l’arrestation de sa famille, Coquereau se déchaîne au cours de l’été. Exécutions sommaires, pillages et attaques de convois sèment une indicible panique chez les républicains du pays. Le 7 août à Saint-Laurent-des-Mortiers, sa troupe fait irruption dans le bourg, fusille sept officiers municipaux et deux soldats présents, avant de poursuivre vers Marigné où deux autres patriotes font les frais de leur passage. Partout les arbres de la ci-devant liberté finissent en bois de chauffage, à Argenton, à Bouère, à Sceaux, etc. Même les églises y passent. Après tout, la plupart servent d’abri aux postes républicains. Le 25 août, les Chouans de Coquereau envahissent Querré et incendient l’église. Le 31, ils s’attaquent à celle de Contigné, liquidant quelques patriotes dans la foulée. Le 4 septembre, des volontaires leur résistent en se retranchant dans l’église. Qu’à cela ne tienne, Les Chouans y boutent le feu.

Les patriotes des campagnes se désespèrent d’autant plus que les troupes républicaines mettent plus de cœur à piller qu’à les défendre. Les exécutions se multiplient en septembre, à Varennes-Boureau, Bouère, Laigné ; puis en octobre, à Miré où les hommes de Coquereau exécutent le maire dans la nuit du 5 au 6 octobre, à nouveau à Bouère, Laigné, Quelaines. Ils visent aussi les détachements isolés et les petits cantonnements d’où les soldats n’osent plus sortir la nuit. Le ravitaillement des villes se tarit peu à peu, jusqu’aux impôts qui ne rentrent plus. Les Chouans ont bien compris qu’ils pouvaient étrangler les villes. A Menil, au sud de Château-Gontier, ils ont affiché sur la porte de l’église que « toutes les charrettes qui ne seront pas démontées sous les huit jours seront brûlées, et ceux à qui elles appartiennent seront sabrés, et toutes villes ou bourgs qui feront résistance seront réduits en cendres ».

Chateau Ecoublere DaonLes autorités républicaines ont pourtant adouci leur ton depuis la chute de Robespierre (juillet 1794), promettant des amnisties, mais rien n’y fait, Coquereau ne change pas son fusil d’épaule. La fin de l’année 1794 est jalonnée d’exécutions de patriotes et d’incendie d’églises, quatre en décembre. Les derniers arbres de la ci-devant liberté encore debout ne font pas long feu non plus. Une telle énergie force l’admiration, mais l’esprit de pacification finit par tempérer son zèle au début de l’année 1795. L’heure est aux traités de paix signés par les Vendéens à la Jaunaye le 17 février, puis par les Chouans à la Mabilais le 20 avril, auquel Coquereau adhère.

Toutefois les armes ne seront pas remisées bien longtemps. Un débarquement d’envergure en baie de Quiberon à la fin du mois de juin doit être couvert par un nouveau soulèvement dans les terres. Coquereau repart en guerre. Le 29, il surprend un détachement républicain qui s’avance vers Daon, mais l’attaque, mal préparée, vire au drame pour les Chouans dont le chef périt sous le sabre des hussards en voulant porter secours à l’un de ses fidèles. Sa mort sera annoncée triomphalement à la tribune de la Convention le 30 juin : « Hier à neuf heures, entre Daon et l’Ecoublère [le quartier général de Coquereau], le bras d’un hussard s’est appesanti sur sa tête et a délivré la patrie d’un monstre qui n’a cessé de la poignarder. » C’est dire à quel point cet impétueux guerrier faisait trembler les Bleus…

Son lieutenant Gaullier lui succèdera le 1er juillet, poursuivant son combat jusqu’à la paix de 1800 qui conduisit au Concordat. Mais même après le Concordat, la Chouannerie restera « le cauchemar de l’Empereur » (Gaugain, Histoire de la Révolution dans la Mayenne).