Au centre du cimetière de Melay se dresse une chapelle à la façade aveugle. Sur son tympan, quelques mots : Reine des Martyrs, priez pour nous. Au lieu de cette invocation, la pierre devait à l’origine être gravée de la scène d’un massacre qui eut lieu non loin de là, près du presbytère, le 25 janvier 1794.Les paroisses situées aux environs de Chemillé, sur les confins angevins de la Vendée Militaire, ont été parmi les premières exposées à la marche des Colonnes infernales. Ces armées commandées par le général Turreau ont reçu pour ordre de détruire la Vendée insurgée et d’en exterminer la population. Cet ordre résulte de plusieurs lois, élaborées par le Comité de Salut public depuis l’été 1793, et votées par la Convention nationale. A présent que l’armée des rebelles a été écrasée au terme de sa campagne au nord de la Loire, il n’existe plus de forces consistantes sur place pour s’opposer à la mise en œuvre de ces textes législatifs. Du moins à son achèvement, car la mission confiée à cette fin aux forces républicaines a été entamée dès septembre 1793. Turreau a maintenant disposé le gros de ses troupes à l’est de la Vendée Militaire. Lui-même commande la 4e colonne partie de Doué vers Cholet.
La 5e colonne aux ordres de Cordelier appuie son flanc droit. Partie de Brissac le 21 janvier 1794, elle a passé le Layon au Pont-Barré et poursuit sa route vers Jallais en dévastant les bourgs et les villages de Beaulieu-sur-Layon, Saint-Lambert-du-Lattay, La Jumellière, Neuvy-en-Mauges, Saint-Lézin, etc. Un second corps détaché de cette colonne et commandé par Crouzat marche plus au sud en semant la mort et la désolation à Gonnord, Joué-Etiau, Chanzeaux, etc.
Le 25 janvier, les soldats incendiaires encerclent Melay, investissent les maisons dont ils sortent brutalement les occupants qu’ils conduisent dans la cour du presbytère. Un tribunal militaire est aussitôt constitué pour juger les prisonniers – essentiellement des femmes. Le sauf-conduit que ces dernières ont reçu du Comité révolutionnaire des Gardes (un village sur la colline des Gardes, entre Chemillé et Cholet) ne change rien à la sentence. Puisque leurs maris ou leurs proches ont combattu dans les rangs des Vendéens, elles sont condamnées à mort avec leurs enfants. Une femme enceinte, Françoise Plessis, implore la clémence de ses juges, qu’au moins ils la jettent en prison le temps que naisse son bébé, et qu’après ils disposent d’elle comme bon leur semblera. Mais rien n’y fait. Le verdict « Aux dragons ! » est sans appel.
Avant de procéder à l’exécution, les soldats profanent les vases sacrés et les vêtements sacerdotaux trouvés dans la cure, puis ils mettent le feu à l’église et aux maisons du bourg, célébrant leur « victoire » par des chants et des danses. Les condamnées observent ce triste spectacle en se préparant à la mort par la prière. Le jour décline déjà quand l’ordre est donné de marcher au supplice, entre deux rangs de soldats. Michelle Viau, marche à la tête du cortège, entonnant le cantique d’action de grâces, Te Deum laudamus. 23 enfants accompagnent les Vendéennes, blottis dans leurs bras ou marchant à leurs côtés.
Arrivées dans un champ voisin de la cure, les victimes sont alignées le long d’une haie, chacune en face de son bourreau. Le commandant de la troupe leur ordonne alors de s’agenouiller, ce qu’elles font sur-le-champ. Mais on remarque qu’ainsi il sera plus difficile de les atteindre. Elles doivent donc se relever. Un roulement de tambour annonce le feu, suivi par une terrible décharge qui fauche les malheureuses dans un épais nuage de fumée. Le commandant ordonne enfin d’achever les survivants à coup de crosse ou de sabre, et de dépouiller les corps.Peu après le départ des soldats, une femme se rend sur le lieu du supplice pour voir, à la lueur de l’incendie des maisons voisines, s’il se trouve quelque rescapé au massacre. Quatre personnes ont en effet survécu : Marie Boulestreau, blessée grièvement à la tête, et qui doit la vie à la clémence d’un soldat qui lui couvrit le visage d’un mouchoir ensanglanté ; Jeanne Belouin, veuve Gourdon, Marie Hilaire, et Pierre Gourdon dont la mère et les quatre frères et sœurs n’ont pas eu sa chance. Pierre, le dernier survivant du carnage, disparaîtra en 1854.
Les corps des victimes de Melay ont été enterrés par deux vieillards et quelques enfants, le lendemain du massacre, dans une fosse creusée à la hâte dans le cimetière paroissial. Ils y resteront pendant 80 ans. L’un des enfants qui participa à cette sépulture, Jacques Leroux, entretint le souvenir des martyrs auprès de ses propres descendants. Son fils aîné put ainsi diriger les fouilles lorsqu’on décida d’élever une chapelle à l’emplacement de la fosse commune. L’exhumation commença le 27 novembre 1874. Les ossements des martyrs reposaient là, pêle-mêle, mais bien conservés.
La construction de la chapelle débuta en mai 1875 et s’acheva le 16 novembre de la même année, par la bénédiction du sanctuaire à l’occasion d’une cérémonie qui mobilisa toute la paroisse de Melay. Les restes des martyrs furent déposés quelques jours plus tard dans deux caveaux près de l’autel. Leur mémoire fut célébrée à deux reprises avec le soutien du Souvenir Vendéen, le 22 juillet 1951 et le 18 juin 1978. C’est lors de cette seconde journée que fut inaugurée la croix de granit érigée à l’emplacement du massacre. Sur son socle on peut lire : « A la mémoire des cinquante-six habitants de Melay fusillés en ce lieu, Martyrs de la Foi, le 25 janvier 1794. »Illustrations : la Chapelle des Martyrs au milieu du cimetière de Melay ; l'intérieur de la Chapelle et les souvenirs des Martyrs ; la Croix des Martyrs inaugurée en 1978 ; les ossements inhumés dans la Chapelle ; l'une des plaques commémoratives posées dans l'église de Melay ; Sacré-Cœur et chapelet accrochés au mur derrière l'autel.
La Chapelle des Martyrs de Melay (49)
Commentaires sur La Chapelle des Martyrs de Melay (49)
- Très beaux clichés ! MERCI pour ce partage et très bonne semaine.
- C'est exact et plus précisément dans un mur du presbytère. Lors de travaux de transformation de ce bâtiment en logements, en 1984, les maçons ont fait d'intéressantes découvertes, comme une pierre gravée de l'ancienne église. Mais c'est surtout une boîte en bois cachée dans un mur à l'arrière qui fit sensation : elle contenait un paquet de « bons de Stofflet », papier-monnaie de 5 et 10 livres remboursables à la paix, que le chef vendéen avait fait imprimer à la fin de l'année 1794.
- Mes enfants sont descendants de Pierre GOURDON qui avait 7 ans lors du massacre. Il a survécu mais sa mère et ses quatre frères et soeurs ont été massacrés.
J'ai découvert cela en faisant ma généalogie, c'est très émouvant. Un fait de l'histoire. Je ne sais pas comment à vécu ce Pierre GOURDON. Il n'y avait pas de psychologue en ce temps-là. - Bonjour,
J'ai une énigme au sujet des noms des victimes inscrites sur la plaque commémorative au sujet de Angélique DURBECÉ :
sur la plaque "Fme N. 39 ans, 2 filles"
Sur le registre de Melay le curé Jacques Galpin écrit :
"Angélique derbecé agée de 39 ans femme de Louis Caillaut et leurs deux filles"
Melay - - Baptêmes, mariages, décès - An II-1797 - Vue 41/83 page de gauche en bas.
Que veux dire le N de la plaque ?
J'ai pas trouvé le couple Angélique Derbecé x Louis Caillaut
Si quelqu'un l'avais ?
Merci
Brévard Jean-Claude - C'est une question généalogique intéressante. J'ai consulté les registres paroissiaux de Melay de 1774 jusqu'à la Révolution. J'ai trouvé :
– Louis CAILLAUD, né le 8 mars 1787 et décédé le 20 mars suivant, fils de Louis CAILLAUD, tisserand, et Angélique TURBECÉ.
– Michelle CAILLAUD, née le 11 septembre 1782, fille de Louis CAILLAUD et Marie DURBECÉ.
Et plus rien en remontant le temps jusqu'en 1774. J'en déduis que le couple est originaire d'une autre paroisse…
- Merci pour ces pistes.
Je pense également a une autre paroisse ....Vezins ?
C'est curieux cette inscription "Femme N" sur la plaque gravée en 1951
Je me suis lancer dans le recensement des martyrs de Melay que je vais essayer de mettre sur Geneanet si j'y arrive ????J'avance a tâtons et c'est pas sur que je réussisse :
https://gw.geneanet.org/autres49?lang=fr