Les archives de Legé (44) ont la chance de conserver de précieux registres clandestins tenus sous la Terreur par l’abbé Gillier. Le vicaire de la paroisse Notre-Dame y a consigné, en janvier 1794, des listes de victimes tuées par les républicains qui « séjournèrent pendant tout ce mois dans le bourg ».
 

Massacre de Lege 1794
Détail du registre clandestin de l'abbé Gillier
(janvier 1794, suite des massacres…)
 

La lecture des pages de ce registre fait frémir, lorsque le mot « massacre » apparaît, dès le 14 septembre 1793. A compter de ce jour, les listes des victimes s’enchaînent de mois en mois, puis s’allongent en 1794. En janvier de cette année-là figurent quelques noms de Legéens exécutés à Noirmoutier, bien que la plupart aient été tués dans la commune.

Lucas de La Championnière évoque dans ses mémoires un « Massacre de Legé » au début de 1794. La situation des troupes de Charette est alors bien précaire. Un jour, alors qu’ils avaient trouvé refuge dans la forêt de Touvois, les Vendéens perçurent le bruit d’une fusillade du côté de Legé, et s’imaginèrent que des renforts émigrés avaient enfin débarqué. Ils ne tardèrent pas à apprendre ce qui avait occasionné cette fusillade. « C’étaient 90 hommes des paroisses de Froidfond et de Falleron qui, sur la foi d’une proclamation répandue par Turreau, s’étaient présentés au poste de Legé, demandant à rentrer chez eux pour y vivre paisiblement ; ils furent fort bien accueillis, on les régala même dans la soirée : le lendemain matin on les fit mettre en rang en avant de la troupe sous prétexte de les compter et à un même signal ils furent tous fusillés. » (Mémoires sur la Guerre de Vendée, 1793-1796, par Lucas de La Championnière, pp. 70-71)
 

Lege 2
En marge de la page des massacres de janvier 1794, on peut lire la mention ci-dessus : « Il y eut pendant ce mois des recherches presque continuelles en les forêts de Grand-Landes, Touvois, Rocheservière, et dans les gîtes et pièces de terre environnantes et qui étaient les seuls lieux qui nous offraient quelques asiles contre un ennemi sans humanité. »
 

Gaëtan Bernoville (L’épopée des Lucs, p. 48) situe ce massacre au 13 janvier 1794*, chiffrant à 64 personnes le nombre des victimes. D’après l'historien nantais Alfred Lallié, une commission militaire a effectivement fait fusiller 64 condamnés à mort originaires des environs. Girard, député de la Vendée, parlera quant à lui de « plus de trois cents hommes, femmes, enfants et vieillards qui furent fusillés à Legé par ordre du général Carpentier », mais sa déclaration établie en octobre 1794 afin de dénoncer les crimes de Turreau, a probablement compris dans ce bilan d’autres massacres perpétrés ici à la même époque. Une colonne du général Haxo occupa en effet Legé les jours suivants. Lorsque les Vendéens reprirent la ville au début de février 1794, ils virent que les républicains, qui y étaient cantonnés, « avaient massacré tous les habitants d’alentour. » (Lucas de La Championnière, p. 73).

Archives départementales de la Loire-Atlantique : registres paroissiaux et d'état civil -> Legé, 1794 (BMS août 1791 - avril 1794) pp. 24-25/38

(* voir la note dans les commentaires ci-dessous)