Le 5 pluviôse an II (24 janvier 1794), le général Turreau, commandant en chef de l'armée de l'Ouest, envoie deux lettres, l'une au Comité de Salut public, la seconde au ministre de la Guerre, afin de les tenir informés de la bonne exécution de son plan d'anéantissement de la Vendée.

Turreau 24 01 1794

J’ai commencé l’exécution du plan que j’avais conçu de traverser la Vendée sur douze colonnes, écrit-il d'abord au Comité de Salut public ; Haxo que j’ai prévenu de ce mouvement a divisé ses forces en huit parties qui marchent à ma rencontre et qui viendront bientôt aboutir à mes deux extrémités, ce qui reste de rebelles ainsi cerné, je ne vois pas qu’un puisse échapper, c’est du moins le moyen le plus sur de parvenir à leur parfait anéantissement.

Mes colonnes ont déjà fait merveilles, pas un rebelle n’a échappé à leurs recherches, une quantité considérable de grains a été découverte et des ordres aussitôt donnés pour les faire filer sur les derrières, ce surcroît de subsistances qu’on ne peut encore calculer offre à l’armée que je commande de très grandes ressources... Enfin, si mes intentions sont bien secondées, il n’existera plus dans la Vendée sous quinze jours ni maisons, ni subsistances, ni armes, ni habitants que ceux qui, cachés dans le fond des forêts auront échappés aux plus scrupuleuses perquisitions.

Car je dois vous observer que je désespère de pouvoir incendier les forêts, et si vous n’adoptez la mesure indispensable et unique que je vais vous proposer, elles serviront longtemps d’asile impénétrable à un grand nombre de ces coquins. Il faut que tout ce qui existe de bois de haute futaie dans la Vendée soit abattu... Cette contrée ainsi découverte, la liberté des routes sera bientôt rétablie et nos ennemis anéantis jusqu’aux dernier.

Je vous invite... à vous occuper au plus tôt de l’arrêté à rendre à cet égard, de la réorganisation des autorités constituées, des indemnités à accorder à ceux dont les habitations sont incendiées, à charge pour eux d’aller habiter une autre contrée, il faut qu’elle soit évacuée en entier par les hommes même qu’on croit révolutionnaires, et qui peut-être n’ont que le masque du patriotisme.

Vous serez sans doute étonnés de ce qu’il existe encore à faire pour terminer une guerre que depuis trop longtemps on vous a présentée comme une chimère, je sais combien il est défavorable pour moi d’avoir à combattre des ennemis dont on s’acharne à nier l’existence, mais je ne consulte point ma gloire, l’intérêt public voilà mon guide, quand j’aurai fait à ma patrie, dans le grade que j’occupe, le sacrifice de toutes mes facultés, je serai trop heureux, dut-on prononcer sur ma conduite un jugement défavorable... 

12 Colonnes

La seconde lettre est adressée à Bouchotte, ministre de la Guerre : … Douze colonnes parties de Parthenay, Bressuire, Douay (Doué-la-Fontaine), Angers, etc. sont en mouvement depuis trois jours. Tu connais les mesures que j'ai prises pour préserver les subsistances de l'incendie, elles sont immenses, et malgré l'empressement que l'on met à les enlever et les porter sur les derrières, le nombre des voitures n'étant pas suffisant, la marche de mes colonnes en est un peu retardée...

L'on fusille tous les jours un grand nombre de brigands que l'on trouve éparpillés... Tu vois, citoyen ministre, combien on en a imposé en disant qu'il n'existait plus de brigands. Cette race infernale semble renaitre de sa cendre ; il n'y a pas de jour qu'on en tue deux cents...

Quelques moyens que l'on ait employé, on n'a pu parvenir à incendier à incendier les forêts et cependant il faut absolument qu'elles soient détruites ; je propose au Comité de Salut public d'en faire une adjudication générale et d'obliger les adjudicataires de les abattre dans le plus court délai, cette mesure est indispensable...

L'on fusille en grand nombre

Ces deux documents sont librement consultables sur le site des Archives de la Vendée, à la rubrique des Archives militaires de la Guerre de Vendée conservées au SHD -> Correspondances -> Armée de l'Ouest -> SHD B 5/8-27 24 janvier 1794