Deux fois par mois, le Musée d’Art et d’Histoire de Cholet invite à la découverte d’une œuvre ou d’un artiste. Le sujet présenté hier après-midi reliait les deux galeries thématiques : l’abstraction géométrique pour sa forme et la Révolution pour son sujet. 

1789 RobespierreLe diptyque de Michel Jouët : « 1789 » (à gauche) et « Robespierre » (à droite)
  

L’œuvre du jour a été réalisée en 1989, à l’occasion du Bicentenaire de la Révolution française. Elle se compose d’un diptyque intitulé « 1789 » et « Robespierre », deux panneaux carrés de 120 cm de côté, entièrement blancs, sur lesquels ont été tendues des cordes de trois couleurs, bleu, blanc et rouge. Réalisée par Michel Jouët (né à Cholet en 1943), elle s’inscrit dans son univers artistique, celui de l’abstraction géométrique, dont Mondrian reste la référence. À un détail près toutefois, l’artiste limite habituellement ses (non-)couleurs au blanc et au noir.

Le tricolore s’est imposé ici pour réaliser une œuvre d’histoire. C’est d’ailleurs la première question qui se pose : « Une œuvre abstraite peut-elle être une peinture d’histoire ? » La jeune conférencière nous en a fait un exposé éloquent, expliquant la difficulté de concevoir la narration de faits réels sans recourir à une représentation figurative, mais en usant de codes symboliques.

Le diptyque pose une seconde question : « La Révolution est-elle un bloc, comme le prétendait Clemenceau ? » Au premier tableau (« 1789 ») évoquant le foisonnement des idées fusant dans tous les sens, répond le second (« Robespierre ») où ne subsiste qu’une corde, tendue au centre. De cette radicalité, Michel Jouët semble signifier qu’il y a eu deux Révolutions, l’une désordonnée, voire anarchique ; l’autre rigoureuse, voire vertueuse, où tous les fils (de vie) discordants ont été coupés. 

Et c’est là que j’ai tiqué ! Notre guide a en effet conclu son propos en soulignant le caractère objectif de cette œuvre d’histoire, en l’opposant aux collections de la galerie des Guerres de Vendée, hautement subjectives à ses yeux. Difficile à soutenir face à une œuvre aussi partisane, où la « vertu » au nom de laquelle gouvernait Robespierre se matérialise dans cette corde tricolore précisément centrée. Comment ne pas y voir l’expression de la maxime « in medio stat virtus » pourtant si contraire à l’extrémisme politique de l’Incorruptible ?

J’ai cependant été rassuré en constatant que plusieurs personnes autour de moi n’avaient rien compris au message de la conférencière, et se sont empressées d’entrer dans la galerie des Guerres de Vendée. Les prosélytes de la Révolution n’ont pas choisi l’abstraction géométrique comme vecteur de propagande le plus efficace. Me voilà consolé…