Les Amis du Pont-Paillat se sont donné rendez-vous hier à Étusson, petit village perdu aux marches de l’Anjou et du Poitou, mais paroisse héroïque pour ses combattants et ses martyrs de la Grande Guerre de Vendée.

EtussonPhoto souvenir au cimetière d'Étusson
  

Le programme concocté par Richard Lueil a déroulé un itinéraire tout autour du bois d’Étusson : dans le bourg lui-même, principalement au cimetière, puis à la Croix-Noire au sud du massif forestier, pour finir à Féole, à la lisière de la commune. Et comme de coutume, cette journée s’est déroulée dans la simplicité et la bonne humeur.

Au cimetière d’Étusson

Une douzaine d’amis se sont ainsi donné rendez-vous au cimetière d’Étusson, où reposent deux personnages hors du commun : Frédéric Ménard, capitaine de paroisse qu’on vit à la tête des insurgés du pays dans toutes les guerres de 1793 à 1815 ; et l’abbé Melaine Dillon, curé de Mougon, au sud des Deux-Sèvres, devenu desservant réfractaire d’Étusson au terme d’un incroyable périple qui le mena dans les rangs de l’armée républicaine, mais aussi en prison. Richard, administrateur de Chemins secrets, leur a rendu hommage en brossant le portrait de ces deux gloires locales, dont Nadine, notre célèbre Maraîchine normande, nous a livré les biographies sur son blog (Frédéric Ménard et l’abbé Dillon).
  

Etusson 1En remontant l'allée du cimetière vers la tombe de Frédéric Ménard...

Etusson 2Xavier Paquereau, notre porte-drapeau

Etusson 3Les renforts arrivent...

Etusson 4La tombe et la plaque de Frédéric Ménard

Etusson 5La tombe de l'abbé Dillon, fleurie par Xavier et Angélique
  

Au pied du calvaire

Les derniers participants nous ayant rejoints, nous nous sommes ensuite rendus à pied au calvaire érigé à l’entrée du bourg. Son piédestal porte une grande plaque de marbre sur laquelle on peut lire en lettres dorées : « À la mémoire du Colonel Frédéric Ménard Chef Vendéen et de ses Fidèles Compagnons morts glorieusement pour la défense de leur Région et de leurs Foyers et des nombreux Martyrs de la paroisse d’Étusson Victimes de la Révolution. » Il s’agit là d’une des plus anciennes plaques commémoratives du Souvenir Vendéen.

Elle fut bénie le dimanche 7 juillet 1935, au milieu d’une foule nombreuse venue des villages alentour. Imaginez le cortège décrit dans le compte rendu de l’époque : « des fillettes en costumes et coiffes du pays, portant des gerbes de fleurs… une compagnie de soldats vendéens armés de faulx… un détachement d’une cinquantaine de cavaliers escortant leur capitaine de paroisse… Le Sacré-Cœur vendéen que ce jour-là chacun arborait fièrement sur la poitrine sera piqué dans une pile de draps de l’armoire à linge. Et tout en gardant leurs bêtes, petits bergers et petites bergères fredonneront pieusement les strophes émouvantes de la Complainte des Martyrs d’Étusson. » (Bulletin du Souvenir Vendéen, n°9, septembre 1935, pp. 5-6)
  

Etusson 6Devant le calvaire d'Étusson

Etusson 7La plaque du Souvenir Vendéen, posée en 1935
  

Le mystère de la « Pierre de Fortune »

La pause déjeuner s’imposait à présent. Tout près d’ici, une aire de pique-nique nous accueillait comme notre camp de base pour le covoiturage. Nous n’y étions pas seuls, puisqu’une cousinade s’y déroulait. Heureux hasard qui nous a permis d’écouter quelques anciens nous parler des événements que nous célébrions. Leur récit a désormais dissipé le mystère de la « Pierre de Fortune », sur laquelle l’abbé Dillon célébrait ses messes clandestines dans le bois d’Étusson.
  

Les Amis du Pont-Paillat - EtussonLes lieux visités : à Étusson, le cimetière et le calvaire (entourés en rouge),
la Croix-Noire et Féole
  

La Croix-Noire et les Martyrs d'Étusson

Après déjeuner, nous sommes allés par des chemins détournés nous perdre dans un bocage profond, à la Croix-Noire, une ferme reculée où se dressent deux monuments ignorés de beaucoup. Ils nous rappellent le martyre de 24 habitants des environs, massacrés par les Bleus le 22 janvier 1794. Richard nous a dépeint cette scène tragique devant la croix marquant le lieu de la fusillade. Nous avons alors marché jusqu’à l’endroit où les corps furent inhumés. Une petite croix de granit en indique l’emplacement au milieu d’un champ. Le dimanche 11 septembre 1988, 200 personnes se sont réunies ici à l’invitation de l’association Vendée Militaire pour inaugurer une plaque en mémoire des habitants d’Étusson morts pour la défense de la foi.

Un dernier couple de participants, venu du sud de la Vienne, nous a rallié à la Croix-Noire. Après un rappel des faits devant les deux monuments, nous avons regagné tous ensemble notre camp de base. Il était plus de 16h et certains d’entre nous devaient déjà nous quitter.
  

Etusson 8Richard nous relate l'exécution des Martyrs d'Étusson.

Etusson 9Recueillement devant la Croix-Noire

Etusson 10Sur le chemin aux abords de la croix

Etusson 11Le monument marquant l'endroit où les Martyrs furent inhumés

Etusson 12Devant l'enclos de la Croix du Pré

Etusson 13La légende dit que l'eau du puits de la Croix-Noire
se change en sang à chaque printemps.

   

À Féole, chez Pierre Devaud

L’ultime étape de la journée se situait à la limite des communes d’Étusson et de Somloire, à cheval entre deux départements. Au lieu-dit Féole (Fiole ou Fayolle), c’était à mon tour de jouer le guide pour présenter la vie de Pierre Devaud, qui vécut ici après la Révolution et y mourut en 1826. Arrosés par quelques gouttes, nous nous sommes blottis sous les parapluies pour partager l’histoire étonnante de ce batailleur vendéen, dont les mémoires demeurent un précieux témoignage. J’ai d’ailleurs présenté une copie du manuscrit original sorti de l’oubli en mai 2014.

Le soleil a promptement chassé cette petite pluie pour une photo de groupe devant l’oratoire de Féole, bâti après la Révolution avec les débris d’une chapelle détruite par les Colonnes infernales. La grande niche abrite des restes de statues, probablement de saint Côme et saint Damien. On raconte que les mamans venaient y prier « saint Pissous » pour guérir l’énurésie nocturne de leurs enfants.
  

Etusson 15L'oratoire près de la maison de Pierre Devaud, à Féole
  

Ce moment de convivialité s’est achevé par un généreux apéritif poitevin offert par Dominique. De retour au camp de base, chacun est reparti dans ses pénates, ravi de cette journée qui en appelle bien d’autres.
  


À lire également :
Les Amis du Pont-Paillat à Étusson (Chemins Secrets)
Jean Ménard dit Frédéric (1766-1843) (La Maraîchine normande)
L'abbé Melaine Dillon (La Maraîchine normande)