Le journal Ouest-France a publié ce matin dans toutes ses éditions des Pays de la Loire l’avis d’Alain Gérard sur la destination des restes humains des Guerres de Vendée mis au jour au Mans en 2009. L’historien préconise l’Historial de la Vendée pour valoriser les objets découverts dans les charniers, et Saint-Florent-le-Vieil pour accueillir les ossements des victimes de la bataille et des massacres des 12 et 13 mars 1793.
Qui est Alain Gérard ?
Un historien, chercheur à l’université de Paris IV Sorbonne et disciple de François Furet, membre du Centre vendéen de recherches historiques (CVRH), auteur de plusieurs ouvrages sur la Vendée, où il habite, notamment Vendée. Les archives de l’extermination (éditions du CVRH, 20l3).
Quelle était sa mission ?
« Éclairer le choix d’un nouvel emplacement » pour les ossements de 154 personnes et les éléments matériels mis au jour place des Jacobins, au Mans, en 2009. Des vestiges de la sanglante bataille du Mans, épisode de la Virée de Galerne pendant les Guerres de Vendée, fin 1793, dont la nouvelle destination fait débat. Alain Gérard vient de remettre son rapport. Il y exprime « le point de vue de l’historien » mais aussi celui « de la réconciliation nationale ».
Pourquoi exclure le Mont des Alouettes et Le Mans ?
La chapelle implantée sur la fameuse colline qui domine Les Herbiers, en Vendée, est l’un des sites en concurrence pour accueillir ossements et objets. II a le soutien de plusieurs élus et associations mémorielles. Au motif qu’il s’agirait d’un « haut lieu des Guerres de Vendée ».
Ce que conteste Alain Gérard : « Il ne s’y est rien passé » à l’époque. C’est par contre un « haut lieu de la mémoire royaliste » ou une chapelle a été édifiée après le passage, en 1823, de la Duchesse d’Angoulême, fille de Louis XVI.
Quant au Mans, ce serait « la localisation logique. On ne bouge pas les sépultures » mais, constate Alain Gérard, si la ville est favorable à « une mémoire commune », elle « ne souhaite pas récupérer ces restes humains ».
Pourquoi Les Lucs-sur-Boulogne ?
Comme musée à vocation historique et archéologique, l’Historial de la Vendée, aux Lucs-sur-Boulogne, serait « le mieux à même » d’assurer la valorisation culturelle des objets mis au jour en même temps que les ossements. Tout en illustrant « les procédures mises en œuvre par les archéologues et la fécondité de leurs découvertes ». Le « respect dû aux morts » empêcherait toutefois que les ossements soient exposés.
Et pourquoi Saint-Florent-le-Vieil ?
Pour les ossements, « qui n’ont pas vocation à être muséographiés et pour lesquels peut être envisagé l’aménagement d’un espace mémoriel », Alain Gérard propose l’église abbatiale de Saint-Florent-le-Vieil, emblématique à plus d’un titre.
D’abord comme point de départ de la Virée de Galerne : « Les Vendéens tués au Mans y sont presque tous passés » et plus de la moitié étaient originaires des Mauges.
Ensuite, la « vaste » crypte de l’édifice pourrait « accueillir dignement ces restes humains », sans enfouissement définitif, car « les progrès futurs des méthodes archéologiques exigent une possible réversibilité dans la conservation des restes ». Avis partagé par les archéologues.
Enfin, c’est à Saint-Florent qu’a eu lieu le geste de pardon si symbolique de la « réconciliation », objectif en toile de fond de cette expertise. En octobre 1793, le général vendéen Bonchamps, agonisant, gracie 5.000 prisonniers républicains. Parmi eux, le père du sculpteur David d’Angers qui, en 1825, offrit à l’abbatiale le cénotaphe de Bonchamps, en guise d’hommage.
Et maintenant ?
Reste à recueillir les conclusions de l’autre expert, Élodie Cabot, anthropologue à l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) à Carquelou, près de Nantes, elle aussi mandatée en février par les représentants de trois collectivités : Jean-Claude Boulard, maire du Mans, Yves Auvinet, président du Conseil départemental de Vendée et Bruno Retailleau, président de la Région Pays de la Loire.
Alain Gérard le stipule, c’est bien l’État et la Drac (Direction régionale de l’action culturelle) qui auront le dernier mot. Ils pourraient très bien opter, comme c’est souvent le cas, pour une conservation dans le dépôt archéologique de la Drac. On l’aura compris, ce n’est pas ce que suggère Alain Gérard.
Article de Jean Delavaud, Ouest-France, vendredi 22 avril 2016