Depuis l’annonce d’un projet de mémorial de la bataille du Mans aux Herbiers (Vendée), il y a un an, l’affaire des ossements vendéens ressurgit dans la presse au moindre bruissement. Il suffit qu’un particulier propose un nouveau lieu de sépulture, même anonymement, pour se voir offrir une quasi pleine page dans le journal. Le dernier article en date d’aujourd’hui se fonde quant à lui sur « l’idée d’une consultation officielle » qui « serait dans l’air », sans qu’on sache qui serait consulté…
Ouest-France, mardi 3 janvier 2017
Ossements vendéens : L’État garde la main
Très controversé, le sort des restes humains des Guerres de Vendée, exhumés au Mans en 2009, reste en suspens. Le ministère de la Culture, souverain, pourrait organiser une consultation.
Les faits
En 2009, des travaux d’urbanisme ont permis la découverte puis l’exhumation des restes de 154 personnes tuées lors de la bataille du Mans, en 1793, épisode sanglant des Guerres de Vendée. Les travaux d’investigation menés par l’Inrap, l’Institut national de recherche archéologique préventive, se sont achevés en 2015. Ces restes se trouvent actuellement entreposés dans les locaux de l’Inrap à Carquefou, près de Nantes.
Le silence de l’État
Lorsque des restes humains sont exhumés en France, c’est l’État qui décide de leur devenir et la découverte du Mans ne fait pas exception à la règle. C’est ainsi qu’il faut interpréter le silence public total gardé, jusqu’alors, par le ministère de la Culture, y compris pendant la controverse qui a ressurgi, début 2016, sur la destination des ossements.
Une affaire sensible
Car les historiens le savent bien : selon un autre principe quasi intangible mais qui, lui, n’est pas gravé dans le marbre de la loi, ce qui a trait à la Révolution française suscite encore les passions et les polémiques. Et en particulier lorsqu’il s’agit des Guerres de Vendée, certains descendants des insurgés estimant que les comptes des massacres ne sont pas encore soldés.
La controverse
Une bonne dizaine d’associations ou d’élus, pour la plupart attachés à la mémoire des guerriers vendéens, mais aussi à celle de la Révolution et de la République, ont fait en 2016 assaut de propositions argumentées pour des lieux de sépulture ou de commémoration : l’abbaye de Saint-Florent-le-Vieil en Maine-et-Loire, le mémorial des Lucs-sur-Boulogne en Vendée, le Carré Plantagenêt du Mans, le Mont des Alouettes, etc. Voire pas de sépulture du tout.
Une expertise officieuse
Trois élus ont pris une initiative. Le président de Région Bruno Retailleau, le maire du Mans Jean-Claude Boulard et Yves (et non Maurice !) Auvinet, le président du département de Vendée, ont diligenté une expertise afin d’« éclairer le choix d’un nouvel emplacement ». Une mission confiée à l’historien Alain Gérard, attaché à l’idée d’une « réconciliation nationale » sur les Guerres de Vendée, et à l’anthropologue de l’Inrap qui a étudié les ossements.
Une consultation officielle ?
L’historien a rendu ses conclusions mais pas l’anthropologue. On peut supposer que, dans la coulisse, l’État ait fait valoir ses prérogatives. Alors patron de la Drac (Direction régionale des affaires culturelles), Louis Bergès a ainsi reçu une bonne partie des protagonistes du dossier, mais a fait savoir que le ministère gardait la main. Il a, depuis, quitté Nantes, mais l’idée d’une « consultation officielle » serait dans l’air, rue de Valois (où siège le ministère de la Culture et de la Communication).
On peut aussi penser que sera pris en compte le potentiel scientifique de ces ossements, qui n’ont pas encore tout dit, en particulier sur le plan médical. En clair, quelle que soit la solution retenue, les restes devront demeurer accessibles à des investigations ultérieures. Au ministre de la Culture de décider. Mais l’actuel ou le prochain ?
Article de Jean Delavaud paru dans Ouest-France,
pages Pays de la Loire, mardi 3 janvier 2017