L’histoire n’a pas rendu justice à Stofflet, qui mériterait un hommage annuel autant que Charette. Ce jour anniversaire de sa capture à la Saugrenière sera donc l’occasion de se recueillir sur la croix érigée en sa mémoire au cœur de cette Vendée angevine devenue la seconde patrie de ce valeureux Lorrain. 

La Saugreniere 2La plaque du Souvenir Vendéen sur la croix à l'entrée du chemin de la Saugrenière,
le 23 février 2019

   

Que faisait Stofflet dans la métairie de la Saugrenière dans la nuit du mardi 23 au mercredi 24 février 1796 ? D’après Michel Coulon, son secrétaire présent à ses côtés à ce moment, il avait reçu de l'abbé Bernier une invitation à se rendre dans cette ferme isolée de la paroisse de La Poitevinière, afin de réunir un conseil de guerre pour se concerter sur une prochaine offensive. 

Qui habitait à la Saugrenière ? Les habitants de la métairie étaient Jacques Lizé et son épouse Marie Usureau ; celle-ci avait un fils d’un premier mariage, Jacques Raimbault. Ils avaient en outre trois domestiques. La maison accueillait deux autres personnes : Jeanne-Gabrielle de Grignon, qui était paralytique, et Perrette Pineau, qui s’occupait d’elle. 

Qui étaient leurs hôtes ce soir-là ? On trouvait le général Stofflet en personne, avec son secrétaire Michel Coulon, son aide de camp Charles de Lichtenheim, son domestique Joseph Moreau, l’officier chouan Joseph-Philippe Erondelle Desvarannes, et deux courriers, Michel Grolleau et Pierre Pineau. 
   

La Saugreniere 1La croix de la Saugrenière, le 23 février 2019
   

Comment les républicains ont-ils été informés de la présence du chef vendéen ? Stofflet fut dénoncé dans la journée du 23 février 1796, probablement par des paysans (1). Le général Caffin envoya aussitôt d’Angers son aide de camp, le lieutenant Liégeard, auprès du général Ménage qui commandait à Chemillé. Un détachement de 200 hommes et une vingtaine de cavaliers, commandés par Charles Loutil, se mit en route à onze heures du soir.

Comment ont-ils trouvé la Saugrenière ? Les Bleus se sont rendus au château du Souchereau et ont obligé le métayer Michel Raimbault à les guider. Mme de La Bouëre rapporte que Michel Raimbault sera fusillé quelque temps après par des chasseurs de Stofflet « qui le regardèrent comme la cause de la mort de leur chef ».

Comment ont-ils surpris les occupants de la Saugrenière ? La métairie fut encerclée à quatre heures du matin. D’après Mme de La Bouëre, qui recueillit les témoignages de Perrette Pineau et de Jacques Raimbault, le commandant de la troupe répondit au « qui vive ? » en annonçant « Forestier », nom d’un officier vendéen. Les Bleus investirent violemment les lieux, se saisirent de Stofflet qui empoigna le grenadier Audouis dans la bagarre, mais qui ne put avoir le dessus et fut même grièvement blessé au front. Les soldats mirent tout sens dessus dessous, allant jusqu’à piétiner Mlle de Grignon dans leur fouille brutale (2). 

Qui fut capturé ? Les Bleus firent prisonniers le général Stofflet, son aide de camp Lichenheim, Erondelle Desvarannes, Joseph Moreau, Pierre Pineau et Michel Grolleau ; Michel Coulon avait réussi à s'échapper. Ils les conduisirent à Angers dans la journée du 24 février. Après leur interrogatoire, les Vendéens seront condamnés à mort, à l’exception de Michel Grolleau qui tricha sur son âge (3). Ils seront fusillés sur le Champ-de-Mars d’Angers le jeudi 25 février 1796. 
   

La Saugreniere 4


Notes : 

  1. Certains auteurs ont prétenu que l’abbé Bernier avait renseigné les républicains sur la présence de Stofflet à la Saugrenière. Une lettre conservée aux Archives nationales contredit cette « légende noire » en révélant que ce sont des paysans qui auraient en fait désigné cette cachette. Cela est d’autant plus crédible que cette correspondance entre le commissaire du Directoire exécutif près la municipalité d’Angers et le ministre de l’Intérieur n’avait aucune raison de ménager un prêtre réfractaire, qui plus est bras droit d’un général vendéen.
  2. Les faits sont corroborés par le rapport du général Ménage, consultable sur le site des Archives de la Vendée (SHD B 5/35-81). Sur l’arrestation de Stofflet, lire l’article de C. et L. Gosselin : La paralytique de la Saugrenière (22 février 1796), Revue du Souvenir Vendéen n° 248 (septembre 2009), pp. 25-38. 
  3. Pour en savoir plus sur Michel Grolleau, lire l’article de Michel Chatry : Celui qui, pris avec Stofflet, ne fut pas fusillé, Revue du Souvenir Vendéen n° 199-200 (septembre 1997), pp. 52-57.