Le dimanche 9 octobre 1955, le Souvenir Vendéen dévoilait sur l’église de La Limouzinière une plaque en mémoire des victimes du massacre perpétré par la colonne de Duquesnoy le 10 février 1794. Il existe toutefois un autre monument qui rappelle ce drame dans cette commune du Pays de Retz.
La vieille croix à l'angle nord du cimetière de La Limouzinière veille sur les victimes du massacre du 10 février 1794.
La marche de la colonne du général Duquesnoy fut aussi brève que sanglante. Elle fit, en seulement une vingtaine de jours, au moins 3.000 victimes de l’aveu même de son commandant, dont un tiers dans l’affaire de Pont-James (1). Ce village situé sur la Boulogne fut le théâtre d’un violent combat au cours duquel Duquesnoy infligea une cruelle défaite à Charette, le lundi 10 février 1794.
Les Bleus se répandirent sur les bourgs et la campagne alentour. « Les Républicains, après la bataille de Pont-James, incendièrent le bourg de Saint-Colombain (2) et massacrèrent près de 500 personnes. Un ruisseau de sang coulait à la porte de l’église (…) Il n’y eut que deux maisons et la cure qui échappèrent à la destruction entière du bourg », peut-on lire dans le registre de la paroisse de Saint-Colomban (3).
La troupe s’est répandue également sur La Limouzière, incendiant le bourg et massacrant un grand nombre d’habitants. Lucas de La Championnière, un officier de l’armée de Charette, s’en fait l’écho dans ses Mémoires : « Notre fuite fut précipitée ; nous trouvions à chaque pas les corps des femmes et des enfants qui venaient d’être massacrés, et dans le bourg de la Limouzinière on en compta cent d’égorgées : la nécessité de marcher sur nous en sauva quelques-unes » (4).
La plaque du Souvenir Vendéen sur l'église de La Limouzinière
La croix de l’ancien cimetière
Les survivants inhumèrent les corps des victimes dans le vieux cimetière bordant l’église au sud. Lorsque le conseil municipal de La Limouzinière décida de niveler l’endroit pour créer une place, en 1854, il fallut d’abord recueillir les ossements des anciennes sépultures. On ouvrit notamment la fosse des victimes de 1794. « On reconnut parmi les autres, nombre de petits ossements d’enfants, rapporte l’abbé Brunelière. Ils reposent aujourd’hui dans le commun ossuaire, à l’angle Nord du cimetière actuel, sous la croix moussue du cimetière désaffecté, que l’on y a transportée avec » (5).
L’origine de cette « croix moussue » reste incertaine, faute d’archives, bien qu’elle semble très ancienne dans sa forme et son décor gravé. Elle devait préexister dans le vieux cimetière près de l’église et n’aurait donc pas été érigée après le massacre. C’est probablement elle qu’on distingue sur le cadastre de 1842. En revanche, cette croix a suivi les restes des victimes du massacre de 1794 et veille toujours sur eux dans l’angle nord de l’actuel cimetière, en bordure de la rue Gazet de La Noë.
Les curieux qui s’inclineront sur ce monument y verront trois lettres gravées sur le socle. Nul n’a pu, à ce jour, en percer le secret…
Détail de la croix de l'ancien cimetière
Notes :
- J.-J. Savary, Guerres des Vendéens et des Chouans contre la République française, t. III, p. 206.
- La commune de Saint-Colomban porta le nom de Saint-Colombin jusqu’en 1972.
- Paul Merceron, Le Martyre, en 1794, d’une paroisse de la Vendée nantaise : Saint-Colombin, 1973, p. 18 (« Les registres de l’état civil de Saint-Colombin accusent environ 150 noms, dont une trentaine de jeunes enfants de 10 mois à 7 ans »). Une plaque du Souvenir Vendéen rappelle le massacre des habitants de Saint-Colomban et Pont-James par la colonne de Duquesnoy le 10 février 1794. Elle fut bénie le 24 août 1947 à l’entrée de l’église de Saint-Colomban (Lettre du Souvenir Vendéen, octobre 1947).
- P.-S. Lucas de La Championnière, Mémoires sur la guerre de Vendée (1793-1796), 1904 (rééd. Pays et Terroirs 1994), p. 77.
- G. Brunelière, La Limouzinière, Nantes, 1935, p. 171.
La plaque du Souvenir Vendéen à la base du clocher
Vue du cimetière de La Limouzinière depuis la vieille croix