La commune de Vendrennes conserve peu de souvenirs de la Grande Guerre de 1793, en dehors des parties ruinées de son vieux château qui rappellent l’incendie du bourg le 21 février 1794.
Le vieux château de Vendrennes au début du XXe siècle
Fondée au XIIe siècle, la châtellenie de Vendrennes connut une histoire tourmentée liée à celle de sa voisine de Mouchamps, en particulier pendant la Guerre de Cent Ans, époque au cours de laquelle le château acquit sa physionomie actuelle. Il serait long d’énumérer la liste de ses seigneurs, si ce n’est pour citer les Clisson et les Belleville auxquels le roi de France Jean II le Bon confisqua les biens en raison de leur collusion avec les Anglais.
Le château de Vendrennes plongea dans l’oubli après cette agitation du XVe siècle. Il passa entre les mains de plusieurs familles, notamment les Parthenay et les Rohan, avant de tomber entre celles de Charles-Auguste de Chabot qui en fit l’acquisition en 1784 avec le Parc-Soubise en Mouchamps (1).
Le bourg et le château de Vendrennes sur le cadastre de 1838
Vendrennes dans les Guerres de Vendée
À la Révolution, le château fut confisqué comme bien national, puisque son propriétaire avait émigré. Mais sa vente fut retardée par la guerre civile qui plaça Vendrennes au cœur du territoire insurgé en 1793. Un comité royaliste s’y constitua avec Savarit, garde-chasse, Châtaignier, maréchal, et Michenaud de la Verrie (2).
On leva une compagnie sous les ordres de François Petit, de la Touche-Boudaud. Ce capitaine de paroisse fera toute la guerre de 1793 ; il sera blessé à Cholet, Château-Gontier, Dol et Blain. Plusieurs de ses soldats firent, comme lui, la Virée de Galerne : certains en reviendront blessés, comme Pierre Bregon et Jean Fortin ; d’autres y laisseront la vie, comme Antoine Enfrin à Pontorson et Jean Bertrand au Mans, pour n’en citer que quelques-uns tués au combat ou condamnés à mort par la commission militaire de Nantes après la défaite de Savenay le 23 décembre 1793 (3).
On pourrait en citer d’autres encore, tués aux batailles de Luçon le 28 juin et le 14 août 1793, ou sur le sol même de la paroisse. Un massacre y fut signalé le 21 février 1794, quand la colonne du général Duquesnoy passa par Vendrennes au cours de sa marche des Herbiers à Saint-Fulgent (4). Soixante femmes, enfants et vieillards auraient été égorgés ce jour-là par les soldats républicains (5). Les noms de quelques victimes nous sont parvenus : Jeanne Pain (30 ans), épouse de Pierre Blanchard, et ses trois enfants, Marianne (11 ans), Jean (6 ans) et Jeanne (18 mois) ; ou encore Mathurin Bertrand (54 ans) et sa femme Catherine Châtaignier (52 ans), tués à la Touche-Bertrand, un hameau sur le vieux chemin de Vendrennes à Saint-Fulgent emprunté par les Bleus.
Hélas, il n’existe pas de martyrologe complet de la paroisse. L’abbé François Adrien, curé de Vendrennes, avait refusé de prêter le serment constitutionnel et s’était embarqué aux Sables-d’Olonne, le 10 septembre 1792, à destination de l’Espagne. Il ne rentrera qu’en 1797 (6). Faute de desservant dans la paroisse, l’inscription des baptêmes, mariages et sépultures restait donc soumise à la présence d’un prêtre insermenté dans les environs, comme l’abbé Allain, prieur de Saint-André-Goule-d’Oie, qui établit un registre clandestin de Vendrennes.
Les ruines de l'aile est du château
Le château de Vendrennes vendu comme bien national
Il y a fort à parier que le château de Vendrennes fut incendié par les Bleus ce 21 février 1794, comme 82 maisons et l’église (7). Ce qu’il en restait fut mis en vente à la bougie le 12 germinal an VI (1er avril 1798). L’ensemble proposé comportait trois lots : « Le château de Vendrennes composé de différents appartements hauts et bas, granges, toiteries, boulangerie, et plusieurs autres servitudes dont partie incendiées, un bâtiment appelé banc à vin, terrasse, affiage (8), plusieurs jardins, cent vingt cinq boisselées de terres labourables, et cinquante boisselées de prés formant la borderie de Vendrennes » ; le moulin à vent et celui à eau, et l’étang de Vendrennes ; et la métairie de la Vieille Verrie (9). Au terme de la vente, « l’administration départementale a adjugé au citoyen Savary comme dernier enchérisseur, le bien national du château, étang, moulin de Vendrennes, et métairie de la Vieille Verrie (…) pour le prix et la somme de quatre cent dix huit mille francs ».
Extrait de l'acte de vente du château de Vendrennes comme bien national en 1798 (A.D. 85, 1 Q 256)
Ce « Savary » n’était autre que René Savarit, l’ancien membre du conseil royaliste de la paroisse. Il était né en 1754 aux Roches-Baritaud, en Saint-Germain-de-Prinçay, et s’était marié en 1788 à Vendrennes avec Marie Durand. Il mourra au château le 27 mars 1804, bien qu’il l’ait revendu à la famille de Chabot de retour d’exil vers 1801. Sa femme restera fermière au château jusqu’à son décès en 1819, puis son frère Charles Durand jusqu’en 1830, et le fils de ce dernier qui occupera les fonctions de maire de Vendrennes de 1839 à 1869 (10).
Le château de Vendrennes n’a guère changé d’aspect depuis cette époque. On peine à y retrouver cette ancienne forteresse autrefois flanquée de huit tours, une à chaque angle et une au milieu de la façade, ceinte de larges douves qu’on ne pouvait franchir que par un pont-levis (11).
Fenêtres à meneaux sur la façade nord
Notes :
- Jean de Raigniac, Histoire des châteaux de Vendée, de l’époque féodale au XIXe siècle, Éditions de Bonnefonds, 2000, p. 32.
- La Verrie est ici le nom d’une métairie située entre le bourg de Vendrennes et la forêt du Parc-Soubise.
- Tous ces noms sont énumérés dans le livre de Philippe Gaury, Au pays des guerres de Vendée, Vendrennes, Éditions du Choletais, 1986, pp. 26-28.
- Le 21 février 1794, la colonne de Duquesnoy s’est rendue de Cholet aux Herbiers, « une petite ville toute brûlée ». Le 22, elle se trouve à Saint-Fulgent, comme l’indique la correspondance de Duquesnoy. Le lendemain elle commit un massacre à Chavagnes-en-Paillers.
- Abbé Aillery, Chroniques paroissiales du diocèse de Luçon, Vendrennes, p. 621.
- Edgar Bourloton, Le clergé vendéen pendant la Révolution, Revue du Bas-Poitou, 1906, pp. 134-135.
- A.D. 85, 1 M 392, Tableaux communaux des maisons incendiées pendant les troubles de la Vendée, arrondissement de Montaigu, 1809.
- Affiage : plantation de jeunes arbres destinés à être greffés ou replanter.
- 1 Q 256, pièce numérisée et consultable sur le site des Archives de la Vendée (vues 68-73). Une boisselée correspond à environ 430 m2.
- Ph. Gaury, op. cit., pp. 16, 29 et 30.
- Abbé Aillery, op. cit., p. 619.
https://twitter.com/VendeensChouans/status/1381261364228931586/photo/1