Les actes notariés du canton de Mortagne-sur-Sèvre enregistrés entre 1628 et 1806 viennent d’être mis en ligne sur le site des Archives de la Vendée. On peut désormais y consulter 6.631 actes numérisés (plus de 15.000 vues !), certains relatifs à des personnes disparues pendant la guerre civile.
Détails des signatures apposées au bas du contrat de mariage de Maurice d'Elbée, futur généralissime vendéen (étude de Jacques Forestier, notaire à La Gaubretière, 17 novembre 1788, 3 E 16 25-3)
Les Archives de la Vendée présentent ici le contenu de ce fonds composé de testaments, contrats de mariage, inventaires, etc. L’article indique que plusieurs actes intéressent la période révolutionnaire, comme le contrat de mariage établi en 1788 entre Maurice Gigost d’Elbée, futur généralissime de la Grande Armée catholique et royale, et Marguerite-Charlotte Duhoux de Hauterive, en présence notamment de Charle-Henri-Félicité Sapinaud de La Rairie, lui aussi futur général vendéen ; ou encore des destructions de biens à Mortagne-sur-Sèvre, mentionnées par René Hullin, qui établit par exemple en 1802 le décès de Pierre Bouchet, notaire et procureur du lieu, mort de maladie entre le 20 et le 30 janvier 1794, précisant « que ses papiers ainsi que son mobilier avoient été la proie des flammes dans l’incendie qui a eu lieu dans ce pays pendant la guerre civile ». Ce fut d’ailleurs aussi le cas des provisions et papiers de Mathurin-Modeste Billaud, notaires des terres du Puy du Fou et celle de Chambretaud avant la Révolution.
Des actes constatant des décès pendant la guerre civile
On remarque dans la chronologie des différentes études un trou entre 1793 et 1796. Rien n’a été enregistré pendant la guerre, dont les effets ont été consignés les années suivantes. Joseph Rigaudeau-Duchataigner, notaire à Tiffauges, constate ainsi quelques décès en 1797 et 1798 :
- Celui de Charles Poyer, tourneur à La Gaubretière, époux de Jeanne Bossard, au sujet duquel Mathurin Lévin atteste qu’il « est mort à la bataille de Chatillon qui a eu lieu en octobre 1793 (vieux style), qu’il l’a vu dans un pré, (qu’il) était mort et mutilé ».
- Celui de Germaine Le Bault de La Touche, décédée sans enfants et veuve de Pierre-Eusèbe Vaugiraud. Elle est « toujours restée dans la Vendée pendant les troubles qui ont eu lieu et a demeuré chez sa mère, commune de La Gaubretière, jusqu'au passage de la Loire qui a eu lieu en octobre 1793 (vieux style) et a péri de l'autre côté dans une déroute ».
- Celui des frères Hilaire et Prosper Coustaud, originaires de Poitiers, qui ont demeuré quelque temps chez le citoyen Verteuil à Beaurepaire en 1795, Prosper ayant été tué d'un coup de feu à la bataille de la Tremblaye, et Hilaire ayant été fait prisonnier au Grand-Moulin à Mallièvre par les républicains qui le conduisirent à Beaurepaire, puis à Cholet, où il fut fusillé avec un nommé Ollivier.
L’étude de Jean-Baptiste Godreau, notaire à La Verrie, livre aussi des informations intéressantes, comme l’acte de notoriété attestant en 1798 le décès de Jeanne-Victoire Lebœuf, épouse de Léon Jourdain des Hermitans, des Herbiers, et de leurs trois enfants âgés de 18 à 22 ans, « par jugement d'une commission militaire du dix-huit nivose an deux (7 janvier 1794), pour avoir participé à la guerre et suivis les rébéles (sic) de la Vendée ».
Un curieux inventaire de perte de biens
dans la déroute d'octobre 1793
Un autre acte de cette même étude, en date du 24 mai 1799, apporte beaucoup de précision à la perte de biens par des habitants de Saint-Hilaire-de-Mortagne au cours de la déroute de l’armée vendéenne après la bataille de Cholet (17 octobre 1793). On y lit que Jean et Jacques Murzeau, fils de fils de Jean Murzeau et Renée Fonteneau, François Garreau et Jean Baufreton, ce dernier étant de La Verrie, attestent que « dans la fin de vendémiaire de l’an deux, au moment du passage de la Loire, qu’ils s’étoient tous ensemble trouvé au lieu de Malville, commune du Mai (Le May-sur-Èvre), avec bœufs et charrettes chargées d’effets, et en avant de l’armée républicaine et à la suite de l’armée des insurgés vendéens, et que Louis Murzeau, laboureur, et Jeanne Jouteau son épouse y étoient aussi avec eux avec huit bœufs et une charrette chargée de cinq charges de bled seigle mesure de Mortagne, avec douze bons draps de toile commune et une potée de beurre de vingt livres ; et qu’alors le péril les menaçoit de bien près, qu’ils furent contraints (…) de se sauver d’un autre côté avec leurs bœufs et leurs charrettes, et que les dits Louis Murzeau et Jeanne Jouteau son épouse, ayant négligé de les suivre pour suivre l’armée des insurgés, ils abandonnèrent les huit bœufs, la charrette et les susdits effets et emportèrent une somme de cent cinquante francs que ledit feu Jean Murzeau leur avoit donné en partant de sa maison avec le goblet (sic) d’argent de ladite Renée Fonteneau, veuve Murzeau, ledit goblet d’argent estimé vingt un francs ; en sorte que par la faute de ladite Jouteau qui s’obstina à ne vouloir pas monter dans sa charrette pour les suivre, que le tout fut perdu, à la réserve seulement de quatre bœufs que lesdits Jean et Pierre Murzeau recouvrèrent peu de temps après l’embarquement des armées, et l’essieu et la ferrure de ladite charrette qu’ils trouvèrent aussi dans les cendres, la charrette ayant été brûlée, et n’ont pu recouvrer autre chose des susdits effets , ni même savoir de ce que sont devenus lesdits Louis Murzeau et Jeanne Jouteau… » Suit l’estimation détaillée de la valeur des biens perdus (3 E 20 122-2-8, vues 420-421).
En plus du minutier de Mortagne-sur Sèvre, pas moins de 28 minutiers anciens sont déjà disponibles sur le site des Archives de la Vendée. Vous les retrouverez dans les « Inventaires et catalogues en ligne », à la rubrique « Notaires : minutier d’Ancien Régime numérisé et analysé ». Celui de Mortagne-sur-Sèvre est consultable ici.