Les Archives de la Vendée ont ajouté à leurs fonds numérisés consultables en ligne les papiers de Louis-Prosper Lofficial, député de la Convention, qui touchent en grande partie à l’histoire des Guerres de Vendée. Y figurent plusieurs lettres de la main de Madame de Bonchamps, qui témoignent de l’amitié de la veuve du général vendéen avec ce conventionnel.
Madame de Bonchamps signe de multiples façons : Scépeaux Debonchamps, Scépeaux Bonchamps, Debonchamps, Bonchamps, etc. (A.D. 85, 316 J 20)
Louis-Prosper Lofficial est né en 1751 à Montigné, près de Cholet, de l’union de Louis-François Lofficial, notaire royal, contrôleur royal et avocat près la baronnie de Montfaucon, et de Thérèse Sourice. Après des études de droit auxquelles il était prédestiné, il obtint le poste de bailli et lieutenant général du bailliage de Vouvant (1), séant à La Châtaigneraie. C’est là qu’il vécut les premiers événements de la Révolution. On peut en suivre le cours au fil de sa correspondance avec son épouse, Marie-Guy-Jacquine Chouteau (2). Ses lettres témoignent de l’enthousiasme, de l’honnêteté, et des déceptions de ce député du Tiers-État du Poitou. Après un séjour à Parthenay, où il avait été nommé juge du district en 1791, il revint à Paris parmi les députés de la Convention, siégeant dans les rangs des modérés, avec lesquels il ne vota pas la mort du roi.
Cette correspondance est également riche d’informations concernant l’insurrection vendéenne (316 J 15). Lofficial y dénonce ceux, généraux ou conventionnels, qui à ses yeux contribuèrent à prolonger la guerre civile (316 J 18, 316 J 19), et il y rend compte naturellement de sa mission dans les départements de l’Ouest du 12 frimaire de décembre 1794 à juin 1795. Lofficial eut en effet un rôle de premier plan dans les négociations de paix avec Charette, qui aboutirent à la signature d’un traité de paix à la Jaunaye le 17 février 1795. Ses papiers relatifs à cette époque constituent d’ailleurs l’essentiel du fonds numérisé par les Archives de la Vendée : décrets, arrêtés et correspondance (316 J 121), manuscrit de son journal qui sera édité en 1896 (316 J 23), proclamations et discours des représentants du peuple (316 J 24), registre des arrêtés et correspondance des représentants du peuple (316 J 25 à 31).
Lofficial et Madame de Bonchamps
Lofficial est aussi connu pour sa défense de la veuve de Bonchamps. Il intervint à cette fin à la demande d’anciens prisonniers, à commencer par Haudaudine, dont le général vendéen avait ordonné la grâce avant de mourir le 18 octobre 1793. Des déclarations à ce sujet sont consultables sous la cote 316 J 20, qui renferme d’autre part plusieurs lettres adressées par Madame de Bonchamps (3) au conventionnel. Elle avait obtenu grâce à lui l’annulation par la Convention de sa condamnation à mort et avait envers lui une entière confiance. Lofficial devint son notaire, son homme d’affaires, mais aussi un ami qui avait de l’ascendant sur elle, ce que montre clairement le ton de ces lettres. La veuve du général vendéen n’avait guère d’autres soutiens. Elle se retrouvait seule avec sa fille Zoé, sans ressources, aux prises avec ses créanciers, dans un pays encore soumis à l’insécurité.
La retranscription de ces lettres étant trop longue pour figurer dans le cadre de cet article, je l’ai mise en pages et annotée sur un document PDF consultable ici. Pour une meilleure lisibilité, j’ai corrigé l’orthographe parfois un peu trop fantaisiste et ajouté la ponctuation qui permet de suivre le texte. Tous les mots sont cependant ceux de Madame de Bonchamps, avec leur naïveté, leurs imperfections, leur spontanéité. On ne peut que regretter, en les lisant, que la veuve du général vendéen n’ait pas écrit elle-même ses Mémoires plutôt que d’en avoir confié la rédaction à la trop académique comtesse de Genlis.
Notes :
- Et non de « Couvent » comme l’indique Wikipédia.
- La demi-sœur de Guy Chouteau, député choletais à la Convention. Cette correspondance de Lofficial avec sa femme, mais aussi avec son beau-frère, a été numérisée et est consultable sur le site des A.D. 85 (316 J 9, 316 J 10, 316 J 11)
- Marie-Renée-Marguerite de Scépeaux est née à Paris le 5 septembre 1767. Elle épousa Charles-Melchior-Artus de Bonchamps, le futur général vendéen, le 10 février 1789, dans la chapelle du palais épiscopal d’Angers. De ce couple sont issus deux enfants : Zoé-Anne-Agathe-Charlotte (1789-1877) et Herménée (1793-1793). Elle mourut à Paris le 22 novembre 1845. Ses Mémoires, rédigés par la comtesse de Genlis et publiés en 1823, relatent les débuts de la Révolution, l’insurrection de 1793, la geste de Bonchamps, l’errance outre-Loire de sa veuve et sa captivité, et s’achèvent par la libération de celle-ci en 1795. On n’y croise pas le nom de Lofficial. La correspondance entre Madame de Bonchamps et le conventionnel est donc une source utile pour compléter ce texte.
- Cette correspondance inédite a été publiée dans la Revue du Bas-Poitou de 1964, pp. 281-290, avec quelques erreurs de retranscription (la lettre du 10 fructidor l’an 3e oublie par exemple plusieurs lignes du document original).